Ah la famille… Parfois un vrai bonheur, parfois une vraie galère, pas vrai ? Alors quand c’est le frère aîné qui se retrouve à assumer ses nombreux frères et sœurs bien plus jeunes que lui, on imagine bien à quel point cela peut être laborieux ! Mais n’empêche que Benjamin Malaussène fait de son mieux pour assumer tout cela, et le fait avec son grand cœur. Bon, c’est sûr qu’il y a des loupés, des bizarreries, des façons de faire un brin étranges… D’aucun s’offusquerait, expliquant que ce n’est tout de même pas une bonne manière d’éduquer des enfants, que ce n’est pas raisonnable… Mais comme c’est fait avec amour, ça change tout, non ? D’autant que ce Malaussène est vraiment le roi de la poisse, le souverain de la malchance, le spécialiste pour se trouver au mauvais endroit au mauvais moment… Et pour tomber dans des situations abracadabrantes… Non, vraiment, il faut avoir beaucoup d’humour pour vivre dans la famille Malaussène !
Auteur : Daniel Pennac
Nombre de volumes : 6
Edition : Gallimard
Dans la tribu Malaussène, il y a la mère et ses sept enfants, tous de pères différents. Comme nous allons les suivre pendant les 6 romans, il est important je crois de les présenter brièvement.
D’abord la mère. Cœur d’artichaut invétéré, elle ne vit que pour ses romances et disparaît à chaque fois qu’elle rencontre un nouvel amour… Avant de réapparaître enceinte, et célibataire. Elle n’est donc présente auprès de ses enfants qu’entre deux coups de foudre, c’est à dire vraiment pas longtemps ! D’ailleurs on ne connaît même pas son prénom…
L’aîné de ses enfants, c’est donc Benjamin Malaussène. Il est employé dans un grand magasin, puis dans une maison d’édition, comme bouc-émissaire. C’est à dire qu’il est payé pour se faire engueuler, menacer de renvoi et traiter comme un incapable devant les clients, afin de leur inspirer de la pitié pour qu’ils retirent leur plaintes. Il a le chic pour tomber dans les embrouilles douteuses sans y prendre garde. Il a d’ailleurs développé une forme d’humour bien à lui. C’est lui le narrateur des romans et le chef de la famille. Et qu’est-ce que c’est drôle !
Louna, la cadette, est infirmière. C’est la seule à ne pas habiter avec toute la smala. Et elle tient à son indépendance ! Bien qu’elle soit quand même souvent fourrée à la maison familiale… Elle a aussi tendance à se laisser emporter dans des romances qui font pleurer. Mais pas comme maman quand même !
Et puis il y a Clara. Ah… Clara ! Benjamin a un petit penchant pour elle… Elle a toujours sur elle son appareil photo, avec lequel elle sonde l’âme des gens. Grâce à lui, elle analyse également les horreurs qu’elle peut voir autour d’elle. C’est un vrai don : ses photos sont criantes de vérité. Et en plus elle est douce… Elle est belle… Ah… Clara !
Thérèse a des dons de voyance. Les cartes, les étoiles, les signes du destin… Elle interprète tout ce qu’elle peut pour lire l’avenir des gens qu’elle aime, et des gens qu’elle veut aider. Si le reste de la famille ne prend pas toujours ses prédictions au sérieux, parfois même jusqu’à s’en moquer, elles se réalisent pourtant. A chaque fois. Thérèse est aussi la plus sérieuse de la famille, ce qui contraste avec son amour pour les astres.
Parlons de Jérémy. Jérémy, lui, c’est le genre d’enfant turbulent… Il est plein de conneries, il a toujours une idée derrière la tête. Et en plus, il est super ingénieux pour les mette en applications, ses idées saugrenues ! Il est vif d’esprit, comprend tout très rapidement… enfin, sauf à l’école… Son passe-temps favori c’est de se moquer et de taquiner -gentiment- les gens. Parce que malgré ses coups de gueule, c’est un bon gamin. Un sacré numéro…
Et le dernier de la famille, c’est Le Petit. Enfin, le dernier au début de l’histoire… Car la tribu Malaussène s’agrandira dès le premier bouquin et tout au long de leurs autres aventures. Le Petit est encore bien jeune. Curieux de tout, il est friand des histoires que Benjamin invente et raconte aux gosses le soir avant l’heure du coucher.
Sans oublier Julius, le vieux chien épileptique de la famille, qui bave et qui pue, qui est un personnage à part entière.
Comme je le disais plus haut, 6 romans sont dédiés aux aventures rocambolesques des Malaussène, et ils sont tous très bons ! Les histoires commencent dans Au bonheur des Ogres, où Benjamin est employé comme bouc-émissaire dans un grand magasin de Belleville. Après l’explosion de plusieurs bombes dans ce dernier, Benjamin est évidemment suspect numéro un pour les enquêteurs. Alors pour sauver sa peau, lui-même et sa tribu vont essayer d’élucider le mystère de ces attentats. Un peu chacun de leur côté, un peu ensemble, le tout au milieu de leur vie de famille complètement loufoque… Ouf… Croyez-moi, c’est pas facile !
Les horaires de la vie devraient prévoir un moment, un moment précis de la journée,où l'on pourrait s'apitoyer sur son sort [...]un moment parfaitement libre, une plage déserte où l'on pourrait mesurer l'étendue du désastre. Ces mesures dans l'œil, la journée serait meilleure, l'illusion bannie, le paysage clairement balisé.
Comme le premier bouquin est vraiment génial, on veut forcément lire la suite… Parce qu’en plus les personnages hauts en couleur sont attachants, tout comme les répliques pleines d’humour, de dérision et de fantaisie du narrateur ! On découvre alors dans La fée Carabine qu’un tueur de vieilles dames rôde dans les rues de Belleville… Et devinez vers qui la police porte tous soupçons ? Bien sûr, Benjamin Malaussène. Ici encore la trame policière offre un prétexte pour s’attarder sur les personnages, sur l’ambiance de Belleville, les histoires transversales… Mais l’issue est tout de même assez tordue !
Les quatre vieilles dames égorgées à Belleville en moins d'un mois ne s'étaient pas ouvertes toutes seules en deux !
Vient ensuite La Petite marchande de prose. Et Clara a rencontré l’amour : il s’appelle Clarence de Saint-Hiver. Wahou, ça en jette. Il est directeur de prison et sexagénaire. Ils vont se marier… Et pendant que Benjamin déprime (un peu trop pour avoir l’air innocent) de voir sa sœur tant aimée partir loin de lui, le mariage ne pourra pas avoir lieu. Et pour cause : Clarence a été assassiné. Oups. Et nous voilà repartis dans une histoire à dormir debout… Des morts, du sangs, du suspens et de l’invraisemblance… Toujours arrosé avec de l’humour. Merci pour nos zygomatiques !
Quand la vie ne tient plus qu'à un fil, c'est fou le prix du fil!
Dans Monsieur Malaussène, Benjamin va devenir papa. Un papa pour de vrai. Et ça le fait quand même bien flipper. Si on rajoute à ça son implication supposée dans une série d’assassinats d’anciennes prostituées, alors là c’est carrément l’angoisse. Ces filles-là n’avaient que pour point commun d’avoir des tableaux de grands maîtres tatoués sur la peau. Qui fait ça ? Pourquoi ? Et ces histoires de famille, encore et toujours… De plus en plus loufoques… Alors Benjamin parle à son enfant, qui naîtra ou peut être pas… (D’ailleurs, ce tome est sorti également en version pièce de théâtre). Il veut lui expliquer sa vision de la vie.
Parce que le bonheur , le bonheur, il n'y a pas que le bonheur dans la vie, il y a la vie ! Naître, c'est à la portée de tout le monde ! Même moi, je suis né ! Mais il faut devenir, ensuite ! devenir ! grandir, croître, pousser, grossir (sans enfler), muer (sans muter), mûrir (sans blettir), évoluer (en évaluant), s'abonnir (sans s'abêtir), durer (sans végéter), vieillir (sans trop rajeunir) et mourir sans râler, pour finir.......un gigantesque programme, une vigilance de chaque instant.... c'est que l'âge se révolte à tout âge contre l'âge, tu sais! Et s'il n'y avait que l'âge........mais il y a le contexte ! Or, le contexte, mon pauvre petit......
Cinquième bouquin, bien plus court que les autres (ce qui lui est souvent reproché d’ailleurs) : Des Chrétiens et des Maures. Rien à voir avec la religion, ou presque. Un matin, au petit déjeuner, Le Petit décrète qu’il veut son papa. Ah. Sauf que les papas de la famille… personne ne les connaît ! Alors le sien… On n’en sait rien. Le Petit déclare une grève de la faim : il ne mangera plus rien tant qu’il n’aura pas son papa. Benjamin essaie alors de retrouver les traces de ce père qui doit bien exister quelque part.
Bon Dieu, cette réponse... l'éternelle et même réponse de tous les salauds du monde, avec ou sans uniforme:
- J'obéissais aux ordres.
Dans le dernier tome, intitulé Aux fruits de la passion, c’est Thérèse qui est amoureuse. Elle qui pourtant ne s’était jusqu’ici intéressée qu’aux astres devient une toute autre personne au contact de son cher et tendre Marie-Colbert de Roberval. Mais le problème, c’est que Benjamin le trouve louche, ce bonhomme-là. Sans savoir pourquoi, juste un pré-sentiment. Un soir en promenant son fidèle Julius, il croit aller voir sa sœur dans sa caravane de diseuse de bonne aventure. Impossible : la caravane explose. Horreur ! La famille est en deuil. Quelle affreuse, affreuse histoire !! Mais le lendemain matin, Thérèse sort de la chambre, toute pimpante, toute souriante. Ok, Ok… Alors à qui appartient le corps calciné retrouvé dans sa caravane ? Et qui a assassiné Marie-Colbert, retrouvé lui aussi mort dans la nuit ? Et bien, ça sent encore le roussi pour Benjamin Malaussène cette histoire…
Le soupçon n'est pas mon fort. Si l'humanité m'est suspecte dans son ensemble, j'ai toujours fait crédit aux particuliers.
Dans cette série de romans, Pennac a mis en œuvre l’art de raconter des tragédies avec des mots légers, de la fantaisie, de l’impertinence. Nan, mais parce qu’on ne s’en rend pas compte en lisant, mais racontées autrement, toutes ces histoires seraient vraiment dramatiques… Malgré la trame présente dans chacun des bouquins (des meurtres, du sang et les premiers soupçons vers Benjamin), les aventures sont riches et pas redondantes. On y retrouve énormément de personnages extravagants, des histoires transversales cocasses, du rire, du sordide, de la fragilité et de la force… Bref, tout un joyeux bordel !
On ne choisit pas sa famille, mais si on le pouvait, je suis sûre que Benjamin Malaussène aurait voulu la même. Exactement.
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