Continuons à décortiquer la tétralogie du Devin Townsend Project. Il y a eu Ki, il y a eu Addicted, voici Deconstruction, le cap difficile avant la sérénité.
Producteur : Devin Townsend
Label : HevyDevy
La fin de l’album Addicted l’annonçait avec des accords inquiétants,  now deconstruct. La tranche de vie d’Addicted, l’existence superficielle et bruyante a ses limites. Un monde sépare encore l’artiste et la paix intérieure. Ce monde est peuplé de drogue, d’alcool et d’autres caches misères divers. Mais en convoquant beaucoup de potes et du gros, très gros son, on devrait s’en sortir. Déconstruisons tout, de force !
Sur ce troisième album du projet, seulement 9 pistes, et pourtant une grosse heure de son. Même si c’est de la musique, je parle volontairement de son, car Deconstruction est de loin l’album le plus bruitiste, bordélique et furieux de la série. Même s'il existe nettement pire en matière de musiques extrêmes, ceux qui ne jurent que par des formats et structures conventionnelles peuvent passer leur chemin.
A la manière d’un bon film d’horreur, les choses commencent pourtant très calmement. Le chant de Devin serait même plutôt posé. Pourtant, petit à petit, insidieusement, tout se transforment sur ce morceau d’ouverture, laissant apparaître un fatras de chœurs bizarres et une batterie métal qui, cette fois, n’est pas là pour nous faire danser. La première explosion est un coup de semonce de courte durée.  Stand enchaîne avec un rythme martial et pesant, renforcé par le génial Mikael Akerfeldt (Opeth), qui ne montre ici que sa façade la plus démoniaque.  Juular fait en suite office de single, qui tout en nous maintenant encore la tête hors de l’eau, nous fait subir un truc un peu Burtonien assez glauque et fou, tout en accélérant sérieusement le rythme de martèlement.
La suite lâche complètement la bride, ne freine aucune agressivité, et alterne les structures les plus étirées aux plus comprimées. Les invités sont nombreux, mais participent au capharnaüm ambiant sans chercher à se faire spécialement remarquer. On note quand même les beuglements du français Joe Duplantier (Gojira) sur Sumeria, ou la surprenante participation de Floor Jensan (qui deviendra par la suite miss Nightwish), qu’on n’avait jamais entendue dans un registre aussi extrême.
Alors, c’est barré, c’est bruyant et y a plein de monde, donc, c’est génial ? Ca se discute.
J’aime bien ses mélodies évanescentes, mise à mort aussitôt qu’on les identifie un peu trop, et ce mix impressionnant de justesse malgré l’épaisseur du son. J’aime bien ce pic vertigineux au milieu de  Planet of the Apes, où Devin chante tristement "I'm sorry baby, I'm sworn to miles and miles of love". Sous un blast métronomique et froid de la batterie. J’aime bien la fin de parcours, hyper violent et jusqu’au-boutiste, qui illustre sans lésiner sur les bruits appétissants son envie de nous extraire sans ménagement tout ce qu’on a pu ingérer comme cochonnerie.
Pourtant, malgré cette purge finale, l’album reste pour moi indigeste, plus bordélique que complexe, voir chiant par moment. Summum du n’importe quoi, The Mighty Masturbator et ses délires électroniques bruitistes, qui confirment que la branlette ça peut rendre sourd.
L’idée artistique globale reste intéressante, le trop plein, l’explosion de quelque chose de bouffi et grouillant de substances et d’idées malignes. Déconstruction est une sorte de lavement à la musique. Seulement, comme tout lavement, c’est chiant, et ça fait mal par là où ça passe.
Le dernier chapitre sera le calme après la tempête, enfin.
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